Interview « mains dans le cambouis » de Matthieu Weider, Directeur du digital et content strategist chez Publicis Consultant – Verbe, pour mieux comprendre la pratique du content marketing intégrée à la technologie et à la data.
- La citation « brainstorming » : « Nous sommes ainsi passés de la différenciation visuelle centrée sur la marque, à l’obligation d’aller toucher la bonne cible au plus juste à la fois au bon moment et surtout dans le bon contexte. Or cet objectif là est quasiment impossible sans data, donc sans technologies« .
- La p’tite phrase qui tue : » (…) élaborer de manière scientifique une stratégie de contenu, grâce à la data sémantique « .
Interview « mains dans le cambouis » de Matthieu Weider, Directeur du digital et content strategist chez Publicis Consultant – Verbe, pour mieux comprendre la pratique du content marketing intégrée à la technologie et à la data.
- La citation « brainstorming » : « Nous sommes ainsi passés de la différenciation visuelle centrée sur la marque, à l’obligation d’aller toucher la bonne cible au plus juste à la fois au bon moment et surtout dans le bon contexte. Or cet objectif là est quasiment impossible sans data, donc sans technologies« .
- La p’tite phrase qui tue : » (…) élaborer de manière scientifique une stratégie de contenu, grâce à la data sémantique « .
Quel lien faites vous entre technologie et content marketing ?
Chez Verbe nous abordons le lien entre content marketing et technologie principalement sous l’angle de la résolution de deux problématiques majeures : l’organisation autour de la création de contenu d’une part, puis la maitrise de toutes ces dimensions de stratégie de contenu marketing d’autre part.
- Pilot : Dans cette perspective, notre objectif à l’égard de nos clients est de disposer d’un côté d’un outil capable d’implémenter toute la dimension organisationnelle autour du contenu, pour donner de la vision en terme d’organisation de ces prises de paroles « en contenu » sous tous leurs formats. A cette fin, nous développons en collaboration avec une start-up depuis 3 ans un outil appelé « Pilot« , et développé spécifiquement afin de répondre à cette première problématique puisque nous avions étudié à l’époque des tels que Kapost, Compendium ou Contently, softwares de content marketing strictement américains et qui n’avaient pas pour ambition d’être développés en Europe. Or, nous avions besoin de développer de tels outils pour nos clients, des outils avec une vision « panoptique », une dimension organisationnelle sur l’ensemble des supports, du print au digital, de l’évènementiel au temps réel, de l’interne à l’externe… et cela sur tous types de supports et de formats.
- Smart content : Notre seconde préoccupation majeure est celle du contenu au travers de la data, autrement dit, comment s’assurer que les contenus créés viendront bien impacter les cibles visées. Traditionnellement, cette détermination des cibles se faisait à l’aide d’idée créative, de planification de contenus et d’études ad-hoc, notamment avec des méthodologies comme celles des personae. Ce que nous avons créé au sein de Publicis Verbe est une réelle offre « data/content » permettant, en utilisant la data, avec des logiciels d’intelligence artificielle, des logiciels de machine learning, d’être capable d’aller mesurer scientifiquement, ce que la cible recherche et ce qu’elle exprime. Nous nous appuyons ici sur le « deep listening ». L’idée est de pouvoir disposer d’outils capables de rechercher des insights éditoriaux cruciaux et impactant pour nourrir nos stratégies de contenu, qui précédemment étaient exclusivement nourries par le planning stratégique et la créativité.
L’innovation majeure consiste ainsi ici finalement à élaborer de manière scientifique une stratégie de contenu, grâce à la data sémantique. Créer des contenus utiles impactant une audience qui aura été ciblée à la façon du CRM, de manière très pointue sur des clusters homogènes plus nombreux et représentatifs, là ou l’on avait précédemment quelques personae (Mireille la retraitée, Sam l’étudiant, etc.).
L’objectif recherché par l’imbrication de la technologie dans la méthodologie même du content marketing est ensuite d’être capable d’adresser de manière très précise une stratégie de contenu puis ensuite d’organiser de manière très fine, ses productions de contenus, peu important le type de client (marque consumer ou client institutionnel), de contenu ou de contexte. Et ce, avec une capacité à décliner cette stratégie à grande échelle, tous clients, supports et contexte confondus.
Une approche à la fois très data-driven du contenu jointe à une expertise très storyteller et « créatrice » qui était l’ADN de Publicis (pure agence de pub) des années 80 ?
Exactement. Nous traitons le content marketing autour de trois « briques » : la data-sémantique (via des d’outils d’analyse) ; ce que nous appelons le « content planning » c’est à dire toute la dimension planning stratégique mais exclusivement orienté contenu ; et enfin naturellement, la brique « créative » qui naturellement chez Verbe, reste centrale.
Ces 3 briques interagissent et viennent nourrir notre offre de smart content qui lie ainsi Content & Data en une méthodologie experte et démontrable à nos clients et nos prospects.
Pouvez-vous préciser cette notion de « smart » content assez proche de celle d’intelligent content qui aux Etats-unis signifie « content drivé par la data » ?
Nous l’entendons de manière beaucoup plus extensive que cela. Derrière le mot « smart »/ intelligent, il faut entendre « intelligence artificielle ». Si je devais schématiser je dirais qu’à l’origine l’on recourt à des outils connus à bien plus large spectre que simplement dédié au seul contenu, comme par exemple Radarly, qui permettent d’écouter très largement tout ce qu’il se passe sur internet au sens large – pas uniquement sur les réseaux sociaux – pour ensuite être capable d’en extraire des clusters homogènes et cohérents. Ce faisant, nous sommes aujourd’hui capable, en ayant enrichis ces données avec d’autres données du type Open Data (Insee / Iris), de savoir effectivement comment tel ou tel groupe de population s’exprime en terme de syntagmes – pour ensuite être capable d’adresser le bon message au bon moment de vie de nos cibles.
Ce faisant il devient possible d’atteindre un niveau de performance sans précédent – ou en tous cas, beaucoup plus performant que des opérations purement de brand content dont le ciblage est encore très générique, assez peu précis et dans une logique encore trop descendante.
Quel est selon vous l’attrait majeur, de la technologie « apporté » au contenu ?
Je pense que, parmi toutes les vertus de la technologie par rapport au contenu, la plus importante d’entre elle est de permettre au contenu « d’émerger ». En clair, nous vivons à l’aire de l’hyper-production de contenu, de l’infobésité au sens large. Le besoin d’émerger, de faire ressortir ses contenus devient un point critique d’une stratégie de content marketing. Or, le seul moyen d’émerger de manière pertinente et efficace est de finement savoir à qui l’on s’adresse. Nous sommes ainsi passés de la différenciation visuelle centrée sur la marque, à l’obligation d’aller toucher la bonne cible au plus juste à la fois au bon moment et surtout dans le bon contexte. Or cet objectif là est quasiment impossible sans data, donc sans technologies.
Il existe aux Etats-Unis, de très nombreuses technologies permettant de satisfaire à peu près tous les types de besoin rencontrés à chacune des étapes d’une stratégie de content marketing. N’aurait-il pas été finalement plus pertinent (et plus simple) de conclure un partenariat avec l’une d’entre elles ?
Avant de concevoir nos propres technologies liées au contenu, dès 2013, nous avions fait le bilan des technologies existantes notamment aux Etats-Unis. C’est ainsi que nous avons conçu « Pilot » dont nous maitrisons le développement et lequel a été co-conçu avec nos clients.
Notre approche a toujours été « user-centric ». Pout tâcher de résumer, Pilot est un calendrier éditorial qui embarque tous les contenus de référence d’une marque ou d’une institution sur l’ensemble de ses canaux, et avec l’ensemble de ses formats. Ce type d’outil ayant été développé en propre, nous maitrisons ses fonctionnalités ce qui nous permet de les faire évoluer selon nos besoins avec une flexibilité qui aurait été impossible si nous avons simplement conclu un partenariat avec une technologie américaine. C’est là la grande différence par rapport aux solutions importées d’Amérique : il n’est pas possible de changer un outil déjà développé, au mieux on ne peut que se conformer à l’outil – ou alors on choisit de ne pas l’utiliser. Avoir développé notre propre outil nous permet donc d’être agnostique aux organisations de nos clients car nous sommes capables d’injecter toute amélioration propre aux besoins métier de nos clients.
Envisagez-vous de commercialiser ces outils développés en propriétaire, de manière autonome de votre agence ?
Comme il s’agit d’un partenariat, il est possible de vendre Pilot en propre, en dehors d’un lien avec le groupe Publicis ou notre agence Verbe. Nous souhaitons rester ouverts, et notamment avec d’autres technologies existantes. Nous avons par exemple échangé avec Hootsuite sur la façon de communiquer avec Pilot car ils excellent dans la dimension distribution des contenus sur les canaux sociaux.
Naturellement d’autres technologies présenteraient de vraies complémentarités avec, en amont, la dimension curation de contenus au titre de l’inspiration et en aval, la mesure de la performance des contenus en intégrant par exemple, les performances en Paid Media. Donc oui, clairement nous réfléchissons à des modalités d’intégration avec d’autres technologies plus abouties sur la dimension de la « plateformisation » des stratégies Paid Owned Earn Media. De toute évidence l’écosystème des technologies marketing est très mouvant et nous évoluons avec lui.
Avez-vous de concurrents sur ces outils développés avec Verbe ?
A ma connaissance nous avons un seul concurrent : Wedia. Une technologie qui au départ était partie du cross-publishing et était capable de publier sur du print et du digital de façon équivalente et qui tend vers ce que nous proposons car ils y ont ajouté des briques, d’organisation, de planification et d’ouverture multicanal.
Comment vous positionnez-vous par rapport à vos concurrents, et notamment face à des agences telles que Webedia ?
Nous sommes souvent face à Webedia sur des appels d’offres. C’est une grande structure, ils sont capables de faire des productions de contenu extrêmement industrialisées alors que nous sommes chez Verbe positionné sur une approche contenu résolument « haute couture » c’est-à-dire la réalisation de contenus stratégiques pour les entreprises. Nos clients sont majoritairement des grands comptes du CAC 40 avec des besoins de prises de paroles très qualitatives. Ainsi nous travaillons avec des journalistes, des « vrais » rédacteurs, des studios de production qui développent une exigence créative forte et partagée. Alors nécessairement, le prix n’est pas le même.
Mais c’est notre positionnement : un contenu intelligent, intelligible et qualitatif !
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Cette thématique de l’imbrication entre content marketing et technologies est traitée de manière exhaustive au sein de notre livre blanc sur ce même thème, auquel ont contribué d’autres décideurs français du content marketing tels que par exemple, Pierre Calmard (Iprospect), Raphaël Grandemange (Webedia), Antoine Mermet (Keyade) ou Guilhem Bertholet (Invox) – pour ne citer qu’eux. Ce livre blanc est téléchargeable ici.